Bousculée par les crises successives mais boostée par les nouvelles règlementations, la profession de courtier mise plus que jamais sur le conseil et la proximité, ses valeurs de base qui ont fondé son succès, pour lutter contre la concurrence des startups de la tech et des bancassureurs. 

  • Contraints à la fermeture de leurs cabinets, les courtiers ont été touchés par la crise du Covid ;
  • Face à la montée en puissance des assurtech et des bancassureurs dans un contexte de crise économique, ils s’inquiètent de la déshumanisation de la pratique du courtage ;
  • Ils gardent la conviction que la proximité, l’écoute et le conseil restent la clé de leur métier ;
  • Loin d’être perçu comme une menace, le digital est perçu comme un outil commercial autant qu’une opportunité d’enrichir la relation courtier-client.
    Après deux ans de crise sanitaire et face à un contexte inflationniste, comment les courtiers en assurance à la personne perçoivent-ils l’évolution de leur profession ? Ce contexte multi-crises a-t-il affecté leur métier, et envisagent-ils de se transformer en conséquence ? Comment les dernières évolutions de la réglementation ont-elles impacté leur activité ? Pour répondre à ces questions, iAssure (Groupe Kereis) a demandé à Opinionway d’interroger les courtiers en assurance à la personne pour connaitre leur état d’esprit face aux évolutions de leur métier(1).
    Laurent Monarque, Président de iAssure précise l’objectif de cette étude inédite : “Partenaire des courtiers indépendants depuis notre création, il y a un peu plus de 5 ans, nous avons voulu connaitre le sentiment des courtiers et leur état d’état d’esprit suite aux différentes crises qui ont touché leurs clients et leur profession. Cette étude montre notamment comment les courtiers ont exploité ces différentes crises pour accélérer leur transformation sur un secteur très challengé.”

LA RELATION DE PROXIMITÉ DES COURTIERS A ÉTÉ CHAMBOULÉE PAR LES CRISES 

À l’image de nombreux secteurs, les cabinets de courtage n’ont pas été épargnés par la crise sanitaire : 

  • –  Près de la moitié (47 %) estime que la crise sanitaire a eu un impact négatif sur leur activité, quand bien même un tiers des courtiers interrogés (33 %) estiment l’impact positif.
  • –  Alors que leur activité reposait avant la crise sanitaire sur l’échange personnalisé en face à face, les confinements successifs ont sans aucun doute bousculé le quotidien des courtiers.
  • –  Le contexte inflationniste crée par ailleurs une tension sur les prix : 83 % des courtiers interrogés affirment que leurs clients cherchent à réduire leurs cotisations pour préserver leur pouvoir d’achat.
  • –  Fait étonnant : malgré cette intention des clients de réduire le montant de leurs cotisations, seulement 21% des courtiers estiment que le prix est un facteur de différenciation face à la concurrence.
    La crise sanitaire a toutefois ouvert de nouvelles opportunités, et a créé un léger effet d’aubaine :
  • –  La moitié (51 %) des courtiers affirment que les clients ont besoin d’être davantage couverts, et 40 % font état d’un besoin concernant de nouveaux risques.
  • –  Malgré cette évolution, la majorité des courtiers n’envisage pas l’avenir sereinement. Ce sont même 62 % qui se disent inquiets pour le développement de leur activité dans ce contexte. En effet, si leur environnement a été secoué par le contexte sanitaire et économique, les courtiers sentent peser sur eux des menaces structurelles.
    CHALLENGÉS PAR LES BANCASSUREURS ET LES ASSURTECH, ILS MISENT SUR LEURS VALEURS DE BASE : LA RELATION HUMAINE ET LE CONSEIL
    Dans un contexte de crise, ce sont souvent les acteurs en position dominante qui se renforcent. Les courtiers ne s’y trompent pas, et citent en majorité (64 %) les bancassureurs comme la menace de premier plan pour leur activité, capables de faire de la vente liée et des économies d’échelle.
    L’autre menace citée par 43% des courtiers interrogés est constituée par les nouveaux entrants pure players technologiques, les “assurtech”. Les 66% des répondants qui jugent négativement leur arrivée leur reprochent en premier lieu de casser les prix (58 %) et de proposer des produits de moins bonne qualité (50 %).
    Mais une nette différence d’analyse émerge quant à l’effet de ces acteurs sur une facette essentielle du métier des courtiers : le conseil. En effet, parmi ceux qui jugent positivement l’arrivée des assurtech sur le marché, 65 % affirment que le rôle de conseil proposé par leurs métier est ainsi davantage reconnu.
    Cet optimisme est appuyé par la vision que les courtiers ont de leur l’activité résolument tournée vers les relations humaines. Ainsi, 68% d’entre eux estiment que pouvoir échanger en face à face avec un interlocuteur reste une nécessité pour les clients eux-mêmes.

Pour se démarquer dans un contexte économique incertain, ils comptent d’ailleurs sur les qualités humaines telles que la réactivité (54 %), la pertinence du conseil (51 %), et les qualités humaines comme l’écoute ou l’empathie (50 %). 

Enfin, les courtiers qui perçoivent positivement les assurtech pensent également que cela leur permet d’être vus comme plus innovants par leurs clients (36%), en particulier les femmes (45%). 

On entrevoit donc un réel enjeu d’image de la profession. Et ce d’autant plus que ces mêmes courtiers ne sont que 24% à estimer que les Assurtech proposent des produits plus innovants. 

Laurent Monarque précise : “Challengés dans l’exercice de leur profession ces deux dernières années, les courtiers se sont adaptés en accélérant l’utilisation des nouvelles technologies tout en misant sur ce qui fait leur principale différence : le conseil personnalisé. In fine, l’enjeu de la concurrence est pour eux moins lié à l’innovation ou à des acteurs qui semblent en position de force que l’impact de ces acteurs sur l’image du métier de courtier.” 

ADOPTION DES TECHNOLOGIES NUMÉRIQUES : LE VIRAGE EST PRIS ! 

La grande majorité des courtiers n’est pas opposée aux nouvelles technologies. Au contraire, une large majorité s’accorde pour dire que la technologie est, en soi, un apport positif. Ainsi, 74 % considèrent que le digital est une force. 

Et pour cause : avec les confinements successifs, les usages distanciés se sont renforcés et les attentes des clients ont évolué. Habitués à des parcours d’achat fluides, les clients sont dorénavant en recherche d’immédiateté dans les relations et les échanges avec les courtiers. Ces derniers le confirment : leurs clients utilisent de plus en plus le numérique pour les contacter (67%). 

Pour répondre à ces attentes, le virage de la transformation des usages s’est accentué pendant la crise sanitaire. Ainsi, aujourd’hui : 

un tiers des courtiers indépendants propose une activité de devis en ligne, près de 15% une activité de ventes en ligne,
1 sur 10 a développé une activité de comparateur en ligne. 

Pour Laurent Monarque : “Il y a donc une réelle conscience des enjeux de l’innovation au service de l’expérience humaine. La nouvelle génération des courtiers a logiquement embrassé les codes des nouvelles technologies et propose depuis quelques années les mêmes solutions que les assurtech, tout en conservant la qualité de conseil qui demeure centrale dans la pratique du métier de courtier.” 

L’ÉVOLUTION DU CONTEXTE RÉGLEMENTAIRE, UNE OPPORTUNITÉ COMMERCIALE POUR LES COURTIERS 

Alors que les courtiers font part de leur inquiétude face au contexte économique et concurrentiel, l’évolution de leur environnement réglementaire constitue une opportunité pour nombre d’entre eux. 

En particulier, la réforme des indemnités journalières par les régimes obligatoires des professions libérales (entrée en vigueur en juillet 2021) est un moyen d’entretenir la relation client pour deux tiers des courtiers TNS (66%) et constitue une opportunité commerciale pour une majorité d’entre eux (56%). Dans tous les cas, ils sont 76% à reconnaître que cette réforme a eu un impact sur leur activité en prévoyance des TNS. 

De même, la réforme 100% santé 2019-2020 a constitué une opportunité commerciale pour 41% des courtiers Santé. Les jeunes courtiers se sont particulièrement saisis de cette réforme, puisqu’une majorité (56%) des courtiers installés depuis moins de 5 ans y ont identifié une opportunité. 

Enfin, les courtiers emprunteurs ont constaté en majorité (54%) une augmentation des demandes spontanées de la part de leurs clients depuis l’entrée en vigueur de la loi Lemoine instaurant la résiliation infra-annuelle (RIA). Dès le mois d’octobre, 40% des courtiers en mesuraient déjà l’impact. Ils observaient une nette augmentation de la part des clients issus de la RIA dans leur production. 

Laurent Monarque, Président de iAssure conclut : “Cette étude inédite, réalisée après deux années de crises structurelle et conjoncturelle, montre que les courtiers ont su exploiter tous les leviers de la transformation pour poursuivre le développement de leur activité en conservant ce qui constitue leur atout majeur : le conseil individualisé, une des valeurs qui fonde leur raison d’être. Néanmoins, si la puissance des bancassurances et l’image innovante des assurtech peuvent les inquiéter, ils font preuve d’agilité pour s’adapter aux évolutions réglementaires ou sociétales. Elle leur a notamment donné, lors de l’instauration de la Loi Lemoine, les moyens de se développer en proposant très rapidement des offres adaptées aux attentes de leurs clients. » 

(1) Enquête réalisée du 13 octobre au 9 novembre 2022 auprès de plus de 500 courtiers en assurances à la personne présents sur tout le territoire national. 

Emmanuel Mayega
A propos de l'auteur

Directeur de la rédaction et de la publication du magazine Assurance & Banque 2.0 et de ce site, Emmanuel a une connaissance accrue de l’intégration des technologies dans l’assurance, la banque et la santé. Ancien rédacteur en chef de ce magazine, il a pendant plus d'une décennie été rédacteur en chef adjoint d’Assurance & Informatique Magazine. ll est un observateur affûté du secteur. Critique, il se définit comme esprit indépendant et provocateur, s’il le faut.

Site web : http://www.assurbanque20.fr

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