Le taux d’épargne des ménages a atteint un niveau record en 2011. Dans le même temps, leurs placements financiers ont sensiblement marqué le pas. La contradiction n’est qu’apparente et illustre la relation complexe entre les deux agrégats.

Selon l’Insee, le taux d’épargne des ménages a atteint 16,8 % de leur revenu disponible brut (RDB) en 2011, soit un niveau record jamais observé depuis 1983. Au cours de la même année, les flux de leurs placements financiers (dépôts à vue, comptes sur Livrets, assurance vie, OPCVM, etc.) ont sensiblement marqué le pas en retombant à 105 Mds d’euros, contre près de 133 Mds d’euros en 2010. Ce qui tend à montrer que la relation de cause à effet entre les deux agrégats n’est pas nécessairement positive. En particulier, une hausse du taux d’épargne n’est pas toujours synonyme d’une augmentation des placements financiers.

En fait, ce qui est mesuré par l’Insee, c’est la part du RDB qui n’est pas dédiée à la consommation. Ce qui revient à dire qu’on peut avoir un taux d’épargne élevé, couplé à des placements financiers en berne. En outre, comme le montre l’évolution intervenue en 2011, dire que le taux d’épargne frôle les 17 % ne signifie pas nécessairement que les Français consacrent une part aussi importante de leurs revenus à alimenter leur Livret A ou leur assurance vie. Plus de la moitié du taux d’épargne est consacrée au remboursement des emprunts immobiliers, dont le poids ne cesse de progresser, en raison de la flambée des prix dans le secteur et donc du niveau d’emprunt.

D’aucuns attribuent, par ailleurs, la hausse du taux d’épargne au contexte de crise qui sévit actuellement. Il est certes prouvé que les périodes de ralentissement économique coïncident souvent avec une poussée de l’épargne de précaution. Mais la crise n’explique pas tout. En fait, si le taux d’épargne est traditionnellement élevé en France, c’est essentiellement parce que le crédit y est faiblement développé. Dans les pays anglo-saxons, où le recours au crédit est historiquement plus important, le taux d’épargne, est faible, voire parfois négatif.

Parallèlement, le taux d’épargne est influencé par la démographie et surtout par le mode de financement des retraites. En France, les tranches de population les plus âgées ont un taux d’épargne élevé, ce qui est contraire à la théorie économique, mais s’explique par le niveau important des retraites, qui dispense ces populations de puiser dans leur pension pour financer leur consommation.

Certains experts s’inquiètent par ailleurs du niveau trop élevé, à leurs yeux, du taux d’épargne en France et de ses conséquences sur une consommation qui commence à montrer des signes d’essoufflement. Ils rêvent donc d’un taux à l’anglo-saxonne qui permettrait à la France d’avoir un moteur de consommation plus robuste. Sauf que la consommation y est déjà le principal moteur de la croissance puisque elle représente environ 80 % du PIB.

En réalité, un taux d’épargne élevé peut avoir des vertus. Il signifie que le pays « ne vit pas au-dessus de ses moyens ». De plus, il permet de « nationaliser » la dette publique et donc de rendre le pays moins dépendant des capitaux internationaux. Cette vertu est illustrée par la crise actuelle, où les pays les plus attaqués (Grèce, Portugal, Espagne) sont ceux où les taux d’épargne sont les plus faibles.

Mohamed Fadili ©CAPA Conseil

Amae Martin
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