Il est passé par toutes les courbes, y compris celle de Gauss. Certains l’ont même enterré vivant, d’autres se gaussent de son avenir. Le segment de l’auto est pourtant là, rétif. Résistant même. Les expositions et salons en la matière se succèdent et mobilisent beaucoup de monde, certes pas comme auparavant. Mais le marché de l’auto est bel et bien là. Car la voiture, ce levier historique de notre liberté nous fait toujours rêver. Par ses modèles futuristes soutenus à coups de concepts cars les uns toujours aussi délirants que les autres. Par ses aptitudes à innover. Aussi. Pourtant, on le disait sans avenir, il y a encore quelques années. Le voilà en passe de faire mentir tous les pronostics. Grâce à ses amortisseurs dont elle a le secret, l’auto et ses marchés traversent les âges. Et conservent ses capacités de fascination. Voyez le nombre de stands déployé au Mondial de l’Auto qui vient d’ouvrir ses portes à Paris, vous comprendrez l’ampleur du phénomène. Mondial, vous dis-je ! Il y a longtemps que les assureurs et bancassureurs l’ont compris, qui se bousculent sur ce marché, pourtant loin d’être synonyme de bonne santé ? Des chiffres ?
En cette fête de la voiture, économisons les stats. Place à l’euphémisme conciliateur : le marché de l’assurance auto reste atone, sans rebond. Seuls les plus féroces en marketing engrangent de nouvelles parts qu’elles grappillent aux concurrents. Que dire des résultats techniques ? Là encore, restons conciliants.
Face à un tel marasme, les porteurs de risques se mettent pourtant en scène au Mondial de l’auto. Pour labourer le terrain et accélérer en vue de mieux négocier la pente devant eux ? Probablement. Mais croyez-moi, les véritables raisons de cet engouement sont ailleurs. Certes elles restent marketing, avant tout. Mais ce marketing-là porte sur un objet nouveau, j’ai nommé la voiture de demain ; la voiture X.0. Elle est connectée, intelligente. La côtoyer permettra certainement de nourrir la source de contrats autos intelligents de demain. Là où le Pay As you Drive (Payd) avait posé les jalons fragiles de l’assurance de demain avec l’échec retentissant qu’on lui sait (prêtez l’oreille, cet échec cuisant résonne encore sur toutes les routes de l’Europe même si quelque assureur distribue encore ses succédanés et ersatz), il faut imaginer de nouveaux produits pour de nouveaux usages adoptés et plébiscités par de nouvelles générations. Car si la voiture connectée partagera sa science avec vous, elle sera elle même partagée par ses propriétaires et occupants. Vive donc l’auto-partage et ses subtilités en termes d’assurances. La génération « Y » la connaît déjà, et bénéficie de quelques contrats d’assurance auto calqués sur le modèle actuariel traditionnel. Les actuaires devront certainement innover toujours plus pour s’aligner sur les attentes de ces nouveaux consommateurs. Cela tombe bien, beaucoup parmi eux sont de cette génération Y. Et donc au fait de leurs propres attentes. Après tout, on n’est jamais mieux servi que par soi-même. Pour autant, ils devront prévoir les comportements de leurs successeurs : la génération Z. Les risques auxquels ils seront confrontés seront-ils les mêmes dans un habitable truffé de composants X.0 ? Mystère et boule de gomme ! À l’instar des ingénieurs de l’automobile désormais habitués aux concepts cars, les actuaires devront-ils céder aux charmes des concepts Insurance contracts ? Un tel délire vaut bien une réflexion. Car l’enjeu est de taille : maîtriser l’assurance de la voiture de demain. C’est pas gagné, comme dirait Ma’am Michu.