C’est fini ! les marchés financiers ne sont plus une chasse gardée pour personne ! Surtout pas à la solde des assureurs ou des banquiers. Attaqués de toutes part, ils sont réduits à la défense de leur portion congrue. Prenons l’exemple des porteurs de risques, longtemps maîtres de leur destin, ils voient leur route entre les mains des Gafa (voitures autonomes, services médicaux, etc.), les offres fusent de partout, les unes toujours plus alléchantes que les autres : services nouveaux, tarifs compétitifs, les porteurs de ces offres jouent sur ces tableaux. Du coup, voilà l’assurance, hier chasse gardée des porteurs de risques, aujourd’hui terrain de jeu de monsieur tout le monde. L’on attend le moment de vérité, celui de l’indemnisation, pour que les consommateurs se rendent compte que la vraie assurance est celle qui sait se mettre à la place du client en cas de pépins, pour porter avec lui le problème (sinistre, maladie, etc.) le dommage rencontré. Régler l’indemnité ne suffit plus. Les assureurs doivent patienter, pour porter le feu sur le terrain de l’accompagnement, de l’expérience client avec laquelle on ne triche pas à la fin.

C’est pourtant dans ce contexte de réalisme que les pratiques de BNP Paribas viennent nous interpeller. En lançant cette semaine Cardif Iard à Rouen, la banque, qui doit faire face aux assauts répétés des Fintechs et autres Gafa, s’en prend au présumé plus faible que lui ! En lançant cette nouvelle compagnie, il entonne le chant du cygne de l’Assurbanque, réponse mathématique à la bancassurance. Car comme l’affirmait un haut cadre dirigeant de la Matmut à cette occasion, « je n’ai jamais cru à l’assurbanque » ! Mais de là à brader tous les bijoux de famille à… l’ennemi devenu partenaire, il est un choix difficile à comprendre pour des esprits simples que nous sommes ! Car dans ce mariage de la carpe et du lapin qui ne mourra sûrement pas, la mutuelle semble avoir beaucoup à perdre, au vu des enjeux, selon nous. Malgré les dénégations des uns et des autres, qu’il est de bon ton d’accepter et de respecter, faute de preuves ; le risque de laisser des plumes (clientèle) ou pardon, sociétariat !, reste grand, au-delà du soi-disant pacte de non-agression implicitement établi entre les protagonistes ! Les promesses n’engagent que ceux qui y croient ! et en matière de monopole client à l’heure du net, j’attribue davantage de crédit aux taux d’attrition annoncés par les études de marché successifs qu’à la méthode Coué du mutualiste. Quoi qu’il en soit, limitons-nous aux faits, qui sont tout, sauf glorieux : l’offre Iard est portée par la banque et donc la connaissance client avec, sachant que le conseiller bancaire est au cœur de l’interaction avec le sociétaire, client d’un nouveau genre qui va se faire à la culture de BNP Paribas. Ne soyons pas pessimiste mais le mariage auquel nous avons été conviés mercredi dernier avait tout l’air d’un enterrement de première classe ! sauf si tout ne nous a pas été révélé, mais nous restons ouvert.

Comme dans la logique de chaîne alimentaire, ceux qui mangent les survivants s’apprêtent à être mangés ! et la horde des GAFA et autres fintechs est aux trousses de notre prédateur bancaire. Que peuvent-ils en faire ? Il est trop tôt pour esquisser des scénarios définitifs. Faute de quoi nous nous limiterons aux intentions des uns et des autres : les robots advisors des fintechs vont contribuer à faciliter la gestion des comptes et de l’épargne des clients ; ces derniers pourront mieux choisir leurs crédits. En la matière, l’assurance emprunteur sera proposée sans questionnaires médical : un parfum de déjà vu avec Praeconis, courtier grossiste qui vient prouver que l’assurance traditionnelle est loin d’être morte ! En fait, telle l’ère de la pierre taillée n’a pas totalement fait disparaître le recours au bois et aux os, la survenue des Gafa et Fintech ne fera pas disparaître les banques et assureurs traditionnels ! Pour ma part, je reste très attaché au canal historique, à un bon mobilier en okoumé qu’à une façade en marbre. Mais là encore, j’ai le choix comme les milanais, de rejeter ou d’accepter Roberto Alagna comme nouveau ténor ! le débat est ouvert, ayant le sang froid de le regarder objectivement.

Emmanuel Mayega
A propos de l'auteur

Directeur de la rédaction et de la publication du magazine Assurance & Banque 2.0 et de ce site, Emmanuel a une connaissance accrue de l’intégration des technologies dans l’assurance, la banque et la santé. Ancien rédacteur en chef de ce magazine, il a pendant plus d'une décennie été rédacteur en chef adjoint d’Assurance & Informatique Magazine. ll est un observateur affûté du secteur. Critique, il se définit comme esprit indépendant et provocateur, s’il le faut.

Site web : http://www.assurbanque20.fr

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