Il a le dos large, le Kerviel. A lui tout seul, il aurait mis à mal la crédibilité de l’édifice bancaire occidental. C’était sans compter avec la nouvelle cohorte de révélations parmi lesquelles celle du scandale du Libor. Où l’on apprend que Bob Diamond, patron de Barclays, ne brille plus à la tête de la banque.

Une étude ING Direct-TNS Sofres, réalisée du 29 mars au 2 avril dernier en France, confirme la défiance des Français vis-à-vis des banques. Pour concrétiser ses projets, seule une personne interviewée sur cinq considère son établissement bancaire comme un partenaire. Et pour cause, l’image de ces pourvoyeurs de fonds est ternie au fil des ans. La crise a mis un accent grave et aigu sur les scandales financiers de ces dernières années, faisant de ces groupes pourtant nécessaires au fonctionnement de notre modèle économique, des géants aux pieds d’argile rongés par les effets induits des Subprimes, rognés par une stratégie d’octroi de crédits trop prudentielle alors même qu’elles ont reçu des pouvoirs publics une hémoglobine provenant de notre banque de sang. Sapristi ! En France, Kerviel doit porter le chapeau scandaleux, un véritable sombrero à trop larges rebords qu’il veut à tout prix partager avec ses ex-dirigeants. Je vous fais l’économie de ce Soap Opera financier que vous savez proche d’un Dallas, canal historique.

Dans ce climat de défiance qui voit les clients confirmer leur suspicion, un nouvel élément à charge vient d’être ajouté au dossier déjà lourd de nos partenaires banquiers. Le scandale de la manipulation frauduleuse des taux interbancaires de 2005 à 2009 par au moins un groupe bancaire jette une nouvelle fois trouble et discrédit sur la profession. Les faits : Barclays aurait manipulé à son avantage le Libor et l’Euribor, deux taux interbancaires qui déterminent au quotidien à quel prix les banques se prêtent leur excédent de trésorerie. A l’arrivée, le banquier aurait gagné abusivement de l’argent. Passons sur l’autre résultat de cette manip, la présentation de résultats plus brillants. Arrêtons-nous un temps sur l’effet dévastateur d’une telle nouvelle. Comment le consommateur, fut-il client d’une banque privée, accueille-t-il de telles pratiques ? Songez un temps au cas de certains petits professionnels qui peinent à boucler les fins de mois et sont réprimandés par leur conseillers bancaires pour quelques euros de dépassement de découvert autorisé ! Que dire du particulier malmené par son banquier décidé à lui vendre mordicus une assurance crédit à des conditions désavantageuses que celles proposées par des acteurs alternatifs prétendument adoubés par une Loi Lagarde en souffrance du fait justement d’abus de position de force de certains établissements bancaires ? Angoissant.

Au-delà du scandale naissant du Libor, qui concernerait également d’autres financiers d’envergure européens et au moins un en France, de telles pratiques ne peuvent que ternir l’image de toute la profession, y compris les acteurs loin d’être véreux, si tentés qu’il en existe, me direz-vous.

Au risque de choquer plus d’un, notre économie a tout intérêt à se ressaisir, ses banques avec. Le cas échéant, l’essence même de nos démocraties pourrait en pâtir. Les pratiques indigestes font le lit de tous les extrémismes. Nous avons tendance à l’oublier, les conséquences de la crise de 1929 ont porté démocratiquement au pouvoir des hommes d’Etat qui n’en étaient pas, comme la suite l’a tristement démontré. Il est peut-être encore temps de nous « déliborer » de ces démons de l’affairisme.

Emmanuel Mayega
Rédacteur en chef

 

Amae Martin
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