Ainsi, la phase opérationnelle du rapprochement entre les deux groupes aura eu raison d’une dynamique digne d’une blitzkrieg (la guerre éclair, ndlr) conclu en moins d’an an, le gentleman agreement entre les deux entités d’obédience différente et donc de cultures éloignées (la protection sociale et la mutualité) a été consommé en seulement un peu plus d’une année, un record salué d’ailleurs par les dirigeants des deux entités. Dans un communiqué de presse du 22 janvier 2019, les forces en présence ont claironné leur succès qu’il faut reconnaître remarquable à plusieurs égards comparé à la cuisine du secteur en la matière. C’était normal tant la course aux multiples obstacles a été rondement bouclée.
Un sans-faute avant la phase opérationnelle
Un sans-faute approuvé par toutes les instances professionnelles : consultation des instances représentatives du personnel validée, approbations de l’Instance de coordination Agirc-Arrco-Ctip, des Assemblées générales des deux groupes, de l’Autorité de la concurrence et de l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR). C’est dire la qualité présumée (sur le papier) de cet ensemble appelé à devenir le premier groupe de protection sociale français.
Moins de six mois après l’entrée à l’œuvre de la phase sérieuse du rapprochement, celle de la concrétisation des incantations, plus personne ne se montre ! toutes les voix se sont tues, cédant la place aux réalités, en général moins séduisantes : l’opérationnel. Tel des enfants qu’ils ne sont pas, les deux groupes se jettent à la face la responsabilité du divorce. Toujours est-il que le premier couac est apparu à travers les déclarations de La Mondiale qui a mis sur la place publique, après son conseil d’administration, les divergences actées par les deux groupes en matière de culture d’entreprise. Lapalisse ne dirait pas mieux ; pour autant AG2R La Mondiale, qui compte tout de même de multiples amour réussies avec le modèles mutualistes pousse à balayer cet argument. Et du côté des égos, le problème semblait réglé quand on sait qui Renaudin avait pris le soin de prévoir l’organisation de sa succession en 2021, à Nicolas Gomart. Pourquoi la Mayo n’a-t-elle pas pris cette fois-ci ?
Les arguments évoqués de part et d’autre, à savoir, la culture d’entreprise différente en disent long sur le malaise des uns et des autres. Que range-t-on derrière culture d’entreprise différente ? beaucoup de clichés et rien du tout aujourd’hui. Une façon d’acter le constat d’échec de deux modèles qui ont pourtant montré leur bien-fondé conjugué efficacement ensemble : elle ouvre la porte à de nouveaux mastodontes qui vendent toute l’assurance à travers un guichet unique, toute l’étendue de l’offre d’assurance qui peut exister sur le marché. Face à Solvabilité 2, ces ensembles constituent une réponse en termes de besoins de capitaux imposés par le régulateur. Et un rempart aux Gafa. Mais cela, semble-t-il, n’a pas suffi. Et chacun reprend sa liberté après un petit tour de quelques mois.
Quels coûts pour les deux groupes ? Vous pensez bien qu’ils ne s’exprimeront pas là-dessus. Une réalité est certaine, ce sera aux frais du consommateur, sous forme d’augmentation tarifaire. Ce sera donc au client de faire valoir la loi Hamon, si c’est le cas et fuir les différents groupes. Comme quoi, dans toute opération de regroupement, somnole les germes (risques) de sa propre destruction.