La vie des mots ressemble parfois à celle des humains. Certains longtemps dans l’anonymat rencontrent soudain une fortune exceptionnelle. Il en est ainsi de l’adjectif « normal ». Si Nicolas Sarkozy était encore Président…, ce qualificatif serait voué aux oubliettes des… éléments de langage.

Bling bling, Fouquet’s et autre yacht étaient devenus monnaie courante. Malgré la paupérisation galopante qui guettait certains et touchait déjà d’autres dans le pays. Au lendemain du 6 mai 2012, tout serait (re)devenu « normal ». Comment expliquer un tel tour de passe-passe ? Hier encore dans la normalité, ce qualificatif devient tout d’un coup singulier. Connotation politique oblige, il fait le bonheur des chroniqueurs qui en (ab)usent. Le mot est dans le vent, comme dirait un ancien locataire de l’Elysée, arrivé tout droit de Tulle, lui aussi. Aurait-il le destin d’une feuille morte, ce mot, comme n’aurait pas dit Jean Guitton ? Inutile de parier, le risque de perdre étant très élevé, le pactole en cas de gain, insignifiant. Laissons ce mot faire sa vie, comme bien d’autres, avant lui. Trop facile une telle décision quand on sait le poids de certains vocables et le choc qu’ils causent dans nos habitudes. Désormais, tous les faits et gestes du nouveau Président sont jaugés à l’aune de la normalité. Ses décisions devront être celles d’un homme normal alors que nous l’avons élu pour son caractère exceptionnel. Non ? Jusqu’à preuve du contraire tout le monde ne peut être Président en France. Normal.

Au-delà de ce constat que je partage, (normal, il est mien), le plus intéressant pour vous et moi dans cette ère normale est de savoir à quelle fiscalité nous allons être assujettis ; comment allons-nous être remboursés par la « Sécu » ou notre assureur complémentaire sachant que la TSCA ne serait pas inquiétée ; combien de points vous seront retirés en cas d’excès de vitesse. Pourrez-vous normalement vivre en France en étant riche ? Pourrez-vous placer votre argent chez les assureurs vie alors même que le nouveau plafond du Livret A vous incitera à éviter l’épargne longue ? Enfin, pourrez-vous, dans ce cas attendre que notre économie reçoive des assureurs des placements issus d’une épargne qu’ils n’ont plus ? Tout cela est-il (a)normal ?

Si les mots sont chers au pays de Racine, Voltaire et autre Rabelais, ils ne doivent pas nous faire oublier la réalité. Celle d’une France en proie à des doutes sur le terrain économique. Face à une Zone euro qui tangue sous la pression d’une Grèce qui la tire inexorablement vers le précipice de l’éclatement, les Français sont confrontés à une fiscalité asphyxiante et attendent des mesures courageuses, même si elles sont normalement draconiennes. Le temps n’est plus à la rhétorique. Place aux actes. Car du boulot, s’il n’y en a pas pour tout le monde, y’en a plein les coudes pour le Président dont le plan de charges est, pour le moins, normal. On peut déjà compter sur lui pour ne pas encourager ses compatriotes à prendre le chemin de la Bourse qui, aux dires des initiés, a perdu en France, plus de 2 millions d’adeptes. Qu’ils se rassurent, ces spécialistes, ce n’est pas un délit, l’information était déjà de notoriété publique depuis que les marchés ont fait boire la tasse à plus d’un investisseur en herbe. Normal. Par temps de crise, il n’est pas acceptable de vouloir gagner en dormant. Au boulot.

 

Emmanuel Mayega

Rédacteur en chef

 

Amae Martin
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