Considérée comme une énergie d’avenir par certains, le gaz de schiste fait l’objet d’une analyse dans le dossier Risque n° 99 de la FFSA.

Gaz de schiste, solution alternative ? Telle est l’interrogation que formule le dossier du dernier numéro de la revue de la FFSA. Dans son travail d’éclairage, la tutelle des société d’assurances met en avant différents points de vue : économistes, financiers, industriels ou écologistes. Quelle que soit leur appartenance professionnelle, chacun de ces contributeurs appelle « à une levée de l’interdiction d’explorer ou d’extraire du gaz de schiste, mais avec des objectifs souvent opposés. » Toutefois, Un manque important à noter : aucune contribution en matière de solution d’assurance n’a été abordé. Et pour cause, « le marché n’étant pas encore suffisamment mûr pour offrir ce type de produit aux industriels. »

Le débat rebondit régulièrement

D’entrée de jeu, cette contribution plante le décor juridique : « le Parlement français a adopté une loi (la loi du 13 juillet 2011) visant à interdire l’exploration et l’exploitation du gaz de schiste en France par fracturation hydraulique. Cette interdiction a été confirmée par le Conseil constitutionnel à la suite d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) déposée par un industriel (1) s’estimant lésé par cette loi. » S’en suit un constat :  « depuis, le débat n’a cessé d’être relancé et de nombreux rapports sur le sujet ont vu le jour. Pas plus tard qu’aux mois de juin et juillet 2014, deux rapports présentant des thèses antinomiques ont été publiés », rappelle l’article. Il s’agit de « Gaz de schiste, comment avancer ? » de l’Institut Montaigne qui estime que cette interdiction représente un véritable handicap pour l’économie française et propose des pistes pour y remédier et « Pour une politique gazière » de la fondation Terra Nova qui propose d’autoriser l’expérimentation de l’exploitation du gaz de schiste « afin de sortir des fantasmes » sur ces ressources et mieux abandonner cette piste.

Tout naturellement, cette revue a abordé les principaux risques inhérents à l’exploitation des gaz de schiste. Et constate qu’ils sont «  principalement environnementaux : cette industrie peut en effet avoir un impact négatif sur l’eau, l’air, la terre et la biodiversité. Mais ils sont également d’ordre sociétal car cette industrie peut conduire à détériorer l’environnement des populations situées à proximité des zones de production (dégradation des nappes phréatiques, mitage des territoires, multiplication des rotations de camions, risque sismique). Face à ces risques toutefois, les avantages liés à cette nouvelle source d’énergie ne peuvent être passés sous silence : aux États-Unis, il est indéniable que l’exploitation de cette nouvelle source d’énergie a généré une baisse significative des coûts de production et un effet emploi très favorable. »

Une réduction du prix du gaz de 10 à 20 % qui engendrerait

entre 0,5 et 1,1 million d’emplois

Qu’apportent les rédacteurs ? « Patrick Artus s’appuie sur des données macroéconomiques américaines pour présenter les effets économiques de l’exploitation du gaz de schiste : baisse du déficit énergétique des États-Unis, coût de l’énergie 3 à 4 fois moins cher que le coût de l’énergie en Europe ou au Japon, redémarrage de l’investissement industriel aux États-Unis et création massive d’emplois. » Quant à Philippe Charlez, il estime que « les principaux secteurs à avoir bénéficié du développement de cette nouvelle source d’énergie sont les secteurs midstream et aval à savoir le transport de gaz et la génération électrique, le raffinage, la pétrochimie et la chimie, et les industries manufacturières fortement consommatrices d’énergie. Toutes choses égales par ailleurs, il estime que le développement du gaz de schiste en Europe pourrait induire une réduction du prix du gaz de 10 à 20 % et engendrer entre 0,5 et 1,1 million d’emplois… » De leur côté, Jean-Marie Chevalier et Patrice Geoffron ont « constaté que certains industriels européens ou asiatiques avaient décidé, afin de préserver leur compétitivité, d’investir dans des capacités de production aux États-Unis. »

Peut-on prévenir les risques associés ? Selon Jean-Claude Perdigues, « les risques liés aux gaz non conventionnels sont bien identifiés et peuvent faire l’objet de mesures de prévention, comme de nombreux autres risques industriels. Il donne dans son article le détail de l’ensemble des risques associés à cette industrie et décrit les engagements que pourraient prendre les industriels pour limiter ces risques, sous réserve que l’Etat s’engage à maintenir un cadre réglementaire clair pour ces activités. » Et Jérôme Courcier, d’ajouter : « les risques associés à l’exploitation des gaz de schiste sont tous a priori maîtrisables puisque nos ingénieurs disposent des techniques de mitigation de ces risques. La seule question à se poser reste le prix de ces techniques de prévention. » Enfin, pour Dominique Venet, « l’exploration et l’exploitation du gaz de schiste sont devenues hors la loi en France suite à un non-débat à base idéologique et électorale ». Pour lui, « la discussion au Parlement s’est focalisée sur des éléments non objectifs et a omis de mesurer l’impact défavorable sur l’environnement de l’interdiction d’exploitation du gaz de schiste. Sa démonstration est implacable : avec un recours accru au gaz de schiste, les États-Unis ont fortement réduit leur consommation de charbon et l’ont plutôt exporté vers l’Europe. Ces exportations ont majoritairement alimenté les centrales électriques au charbon allemandes, l’Allemagne ayant décidé d’abandonner le nucléaire. C’est donc l’Europe tout entière qui subit la pollution des centrales à charbon allemandes, à défaut d’avoir accepté de se lancer dans l’exploitation du gaz de schiste. »

Cette contribution devrait certainement éclairer les porteurs de risques sur d’éventuelles couvertures à proposer, le moment venu. C’est d’ailleurs l’une des vocations de la Revue Risques que d’inviter les acteurs de la profession à une démarche proactive.

Emmanuel Mayega
A propos de l'auteur

Directeur de la rédaction et de la publication du magazine Assurance & Banque 2.0 et de ce site, Emmanuel a une connaissance accrue de l’intégration des technologies dans l’assurance, la banque et la santé. Ancien rédacteur en chef de ce magazine, il a pendant plus d'une décennie été rédacteur en chef adjoint d’Assurance & Informatique Magazine. ll est un observateur affûté du secteur. Critique, il se définit comme esprit indépendant et provocateur, s’il le faut.

Site web : http://www.assurbanque20.fr

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