Arrêtons parfois de céder à la facilité. Les banques ? Toutes des escrocs de grand chemin ! Les assurances ? Des menteuses. Eh bien, si parfois ces lieux communs sont vérifiés pour certains, ils perdent de leur réalité, à l’aune du terrain. La conférence de CCM Benchmark de cette semaine, a été une occasion inespérée de le vérifier.

Abordant le digital sous toutes ses coutures, la première table ronde verse dans les paroles convenues, malgré la pugnacité du modérateur, à la recherche de pépites à révéler. Pourtant, dans le flot des “réalisationnettes” brandies ici et là sous forme d’autocongratulation, une petite expression, malgré son statut de néologisme, a traversé l’auditoire, sans crier gare. L’egosystème, c’est de lui qu’il s’agit, prévaut sur le terrain,  à la place de l’écosystème, a lâché l’un des orateurs, fendant ainsi l’armure ! Entendez, les assurances et, dans une large mesure, les banques, préfèrent privilégier le travail en solo, plutôt que d’œuvrer en synergie avec les acteurs pure players du digital. Mis à part Withings, qui est l’un des rares heureux élus start-up à grappiller  quelque kopec des fameux 180 millions dépensés en trois ans et Tom Tom pour réfléchir sur de nouveaux modèles liés au Pay As You Drive (Payd), les acteurs de la finance brillent par leur frilosité. « Après des déclarations d’intention sur la volonté d’innover en collaboration avec l’écosystème, le soufflé retombe très vite. Nous attendons ces partenariats qui peinent à prendre corps », s’indigne un représentant d’Amazon.

La peur d’un remake de la bulle digitale ?

Face à une telle situation, il serait tout à fait logique que les start-up considèrent la banque et l’assurance comme de seconds couteaux de l’exploitation du digital. Ce qui n’est pas vrai, tant leurs besoins sont multiples et variés. Faisant le chat aux portes de ces professions, les start-up vont-elles finir par déserter ? Ce serait compréhensible. Les assurances et les banques pourraient alors, à raison, brandir le risque d’un remake de la bulle digitale au sortir des années 90. Certains porteurs de risques et business Angels avaient « raqué » comme des éléphants pour ne même pas arriver à accoucher d’une souris. La prudence est donc de mise face à des jeunes cols blancs sans cravate, de véritables génies de la transformation. Toutefois, rappelons-le, le risque d’anachronisme est grand ici. Autres temps, autres pratiques.

En France, ces acteurs-là ont parfois payé cher l’attentisme du marché national. Une preuve concrète, l’Etat avait encouragé la constitution de jeunes pousses pour promouvoir le marché de la télémédecine. Beaucoup d’acteurs privés avaient investi jusqu’à leurs deniers personnels pour, enfin, ne jamais être viables. Comment, à ce rythme-là, promouvoir le tissu qui permettra à tout notre terroir d’innover sur un monde interconnecté qui n’attend plus.

J’entends mes oreilles siffler. Et pour cause, certains ont, déjà, mis en place des Factories et/ou en soutiennent plusieurs. Certes, cela est vrai ; pour autant, où sont les premiers résultats concrets ? L’egosystème limite probablement leur potentiel de développement. Assurances et banques de ce pays : ouvrez-vous. Privilégiez l’écosystème à l’egosystème.

Emmanuel Mayega
A propos de l'auteur

Directeur de la rédaction et de la publication du magazine Assurance & Banque 2.0 et de ce site, Emmanuel a une connaissance accrue de l’intégration des technologies dans l’assurance, la banque et la santé. Ancien rédacteur en chef de ce magazine, il a pendant plus d'une décennie été rédacteur en chef adjoint d’Assurance & Informatique Magazine. ll est un observateur affûté du secteur. Critique, il se définit comme esprit indépendant et provocateur, s’il le faut.

Site web : http://www.assurbanque20.fr

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