En cette époque d’obsolescence programmée, il est paradoxalement difficile de dire si le SMS a encore de beaux jours devant lui. Malmené par les messageries instantanées, il a pourtant réussi à trouver son chemin dans l’opérationnel. Saura-t-il y garder sa place ?
Épique époque qui nous fait en voir de toutes les couleurs. Bigarrée ? Pittoresque. Demandez aux opérateurs de télécoms, surtout français, qui se sont fait et continuent de se faire des… Bourses en or sur le dos des consommateurs grâce à cette forme de communication. Après avoir, raisons économiques obligent, poussé nos ferments à écrire comme ils parlent (rien à voir avec la noble phonétique), assassinant à tout va Vaugelas, ces courts messages ont fini par trouver une porte d’entrée dans l’opérationnel. Et quelle porte! En marketing, certaines entreprises ont compris l’intérêt de les adresser à leurs clients. Spontanéité assurée, y compris chez les porteurs de risques. Des milliards de SMS sont ainsi acheminés chaque année, faisant de ce canal un outil de recrutement et/ou de fidélisation de clients. C’était sans compter sur les messageries instantanées. Populaires depuis quelques années, elles ont donné un sacré coup de vieux au SMS que l’on disait pourtant jeune, il y a encore quelques années. La génération Y l’a progressivement abandonné pour ses points faibles : non seulement il coûte cher, mais il est techniquement limité là où les messageries instantanées brillent par leurs atouts 2.0 : interactivité en temps réel, possibilité de téléphoner, d’envoyer des images dans le monde entier, le tout pour même pas une bouchée de pain, là où SMS et MMS ruinent les consommateurs. La suite, on la connaît. Elle s’écrit en plusieurs milliards de dollars pour WhatsApp que vient de racheter Facebook.
En mettant la main sur cet espace juvénile, le vieillard des réseaux sociaux qui vient seulement de fêter son dixième anniversaire entend s’offrir une cure de jouvence. Le vrai débat est de savoir comment le géant de cette planète du Social networking va intégrer cette fenêtre sur la jeunesse. Bien sûr, j’entends, d’ici, les tenants de la pensée unique me dire qu’il n’en est rien, la bataille étant celle du contrôle des données. Ce n’est pas totalement faux ; en revanche, pour en arriver là, il faudra bien agencer ces deux mondes, celui des moins jeunes qu’est devenu Facebook désormais déserté par les moins âgés et l’univers évanescent voire fugace des messageries instantanées, comme leur nom l’indique. Il y va de l’avenir du repreneur, qui vient de débourser la coquette somme de 4 Mds€ en cash, sur les 19 Mds d’euros d’une transaction pour le moins folle, s’agissant d’une entreprise de 55 personnes.
Au-delà de cet événement qu’est l’entrée de WhatsApp dans le giron de Facebook, se pose désormais la question de l’avenir du SMS. Longtemps délaissée aux jeunes, cette arme de conquête massive pourra-t-elle conserver sa place ou alors jouer un rôle important dans l’opérationnel comme c’est le cas actuellement ? Ou alors sera-t-elle réservée précisément à un point précis du parcours client ? Difficile à dire désormais tant les innovations vont vite. Au rythme de l’obsolescence programmée des appareils qui les portent. Aux dernières nouvelles, la proposition d’un député socialiste du Bas-Rhin de taxer les SMS sur tout le territoire français en vue de financer les effets des récentes inondations qui ont frappé le pays pourrait davantage fragiliser ce mode de communication. Mais Bercy semble rester indifférent à une telle suggestion, laissant l’indemnisation à leurs professionnels. Vous devinez certainement de qui je parle.
Emmanuel Mayega
Rédacteur en chef
